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Les Jeudis du Songeur (337)

CE QU’ON PEUT NE PAS OUBLIER…

Toutes les expressions citées dans la chronique de jeudi dernier ont été recueillies et replacées dans leur contexte dans mon petit livre Révisez vos Références politiques, paru en 2006, dont vous pouvez consulter la version numérique en cliquant sur ce lien. Pour alléger la réponse à chaque citation évoquée, je vais donc vous renvoyer au numéro de la référence et à la page où vous pourrez l’atteindre. Bonne moisson !

Et d’abord, réponses au questionnaire 1 à 10 :

1/ Qui, par qui, et quand, une personnalité politique connue fut définie comme « homme du passé » ? Et quelle fut la réponse de ce dernier ?

V. Giscard qualifia ainsi F. Mitterrand en 1974. La réplique de ce dernier fut, en 1981 « Vous êtes devenu l’homme du passif. » Voir Réf. 66, p. 39.

2/ Que diriez-vous d’un certain « Jaruzelski » ?

Dans la nuit du 12/13 déc. 1981, ce général d’obédience russe qui gère la Pologne, pays satellite de l’URSS fait un brutal coup d’État : des milliers d’opposants sont arrêtés ; le pays est coupé du monde. Lech Walesa, héros du syndicat Solidarité, est placé en résidence surveillée. On craint une invasion de l’armée soviétique, destinée à briser le processus de libéralisation du régime. Le lundi qui suit, en fin de cours, je pose la question à ma classe : « Que s’est-il passé ce week-end ? », à quoi une élève qui n’a rien suivi de l’événement me fait cette réponse : « Je suis vachement amoureuse ». Voir Réf. 75, page 43.

3/ Le fameux « séisme » du « 21 avril », de quoi s’agissait-il ?

L’arrivée de Jean-Marie Le Pen en seconde position, au Premier tour de l’élection présidentielle en avril 2002. Voir Réf. 161, page 105.

4/ Qui, quand et pourquoi, m’a accusé de faire, avec d’autres, de la « mauvaise graisse » ?

Alain Juppé ! Qui se plaint de la fonction publique en 1995. Voir Réf. 130, page 83.

5/ En quoi, qui, et quand a-t-on pu dire « La France s’ennuie » ?

Le journaliste Viansson Ponté, citant Lamartine, juste avant mai 68. Cf. Réf. 3bis, p. 15.

6/ Si la locution « Trente glorieuses » ne renvoie pas à l’épopée napoléonienne, que célèbre-t-elle exactement ?

La période 1945-1975, selon l’économiste Jean Fourastié en 1979. Cf. Réf. 12bis, p. 18.

7/ Quel est le bilan qui fut le premier, historiquement, à être jugé « globalement positif » ?

Celui des pays socialistes, selon Georges Marchais. Voir Réf. 43bis, p. 27.

8/ Comment s’est établi le concept de « devoir de mémoire » ?

À l’issue de la Shoah, que personne ne doit oublier. Cf. Réf. 141, p. 88.

9/ Si Gide a dit : « Il faut suivre sa pente quand elle monte », quel orateur a précisé : « La route est droite mais la pente est raide » ?

Raffarin. Il s’agit d’une « raffarinade », parmi d’autres… Cf. Réf. 165, page 108.

10/ Quel polonais aurait dit : « N’ayez pas peur ! », en s’inspirant de quels auteurs ?

Le Pape Jean-Paul II, le jour de son intronisation, reprenant une parole biblique. Cf. Réf. 33bis, page 24.

Voici maintenant, recontextées en ordre plus ou moins chronologique la quarantaine d’expressions dont vous avez le droit de vous souvenir :

« La politique de la France ne se fait pas à la corbeille »

De Gaulle, en 1966. Voir Réf. 56bis, page 32.

« Nous sommes tous des juifs allemands »

Cohn Bendit en mai 1968. Voir Réf. 19bis, page 21.

« Jouissez sans entraves »

Slogan soixante-huitard, parmi d’autres qu’on peut lui préférer comme : Les murs ont la parole, ou Soyez réaliste : demandez l’impossible. Voir Réf. 30bis et 34bis, pages 23 et 24.

« Changer la vie »

Formule fétiche empruntée à Rimbaud, et qui de mai 68 à mai 81, fut rêvée comme programme politique d’une certaine gauche française, avant de figurer dans un slogan du Crédit agricole en 2006 : « Une relation durable, ça change la vie » (voir plus loin ou p. 121),

« Socialisme à visage humain »

Qualification du « printemps de Prague » en 1968. Cf. Réf. 37bis, page 25.

« La télévision, c’est la voix de la France »

Pompidou, en juillet 1970. Réf. 20bis, page 21.

Affaire Lip

En Août 1973, la tentative d’autogestion de la société Lip, qui ne plaisait pas trop à l’ordre industriel du capitalisme français, sombra dans la faillite. Les autorités alternèrent le bâton (répression policière du ministre Marcellin) et la carotte (un homme de bonne volonté, cherchant à négocier pour une solution industrielle-humaine, Monsieur Giraud). Ce fut l’occasion de ma première « Tribune libre » dans Combat, cf. pièce jointe

Interruption de grossesse

En novembre 1973, le mot « avortement », qui désignait une triste réalité, fut remplacé par l’expression « interruption de grossesse », qui légitimait moralement la même réalité, en la médicalisant. C’est-à-dire, en délégitimant l’approche morale de cet infanticide. Ce fut l’occasion d’une longue Tribune libre de ma part, dans le journal Combat, que je ne regrette pas lorsque je vois l’avortement se banaliser comme simple moyen de contrôle des naissances. Voir : jeudi du Songeur n°250.

« Je voudrais regarder la France au fond des yeux » (19-04-74)

Oui, cela a été déclaré, à la télé, le 19-04-1974. Cf. Réf. 31bis, page 23.

« On ne tire pas sur une ambulance »

Françoise Giroud évite d’accabler le candidat Chaban-Delmas, en avril 1974. Cf. Réf. 58bis, p. 32.

« J’ai dit à ma femme : fais les valises, on rentre à la maison »

G. Marchais à l’émission Cartes sur table du 1-02-1978. Cf. Réf. 10bis, page 18.

« Le socialisme, une idée qui fait son chemin »

Tel fut le slogan de l’affiche PS, lors des législatives de 1978. Cf. Réf. 35bis, p.37

« Solidarnosc »

Fondation du syndicat « Solidarité », le 30 août 198O, bientôt dirigé par Lech Walesa.

« État de grâce »

Le sens politique donnée par F. Mitterrand à cette expression date du 16-03-81. Réf. 64, p. 37.

« Le 2 septembre, j’enlève le haut, le 4 j’enlève le bas »

Campagne publicitaire du 31-08-1981. Un vrai strip tease mural. Cf. Réf. 71, page 41.

« Bien entendu, nous allons ne rien faire »

Réponse française au coup d’état du général Jaruzelski. Cf. Réf. 75, page 43.

« Touche pas à mon pote »

Slogan de SOS racisme, le 15-06-85. Réf. 89, p. 51.

« Nous allons terroriser les terroristes »

Charles Pasqua, en mars avril 86. Cf. Réf. 94, page 54.

« Point de détail »

La Shoah selon Le Pen, le 13-09-1987. Cf. Réf. 103, pages 59-60.

« Délit d’initiés »

Piège auquel fut pris l’honnête ministre Pierre Bérégovoy le 3-01-1989f. Réf. 107, p. 65.

« Vache folle »

Expression des médias pour désigner l’épidémie anglaise d’Encéphalopathie Spongiforme Bovine, et ses suites, le 2-03-1991. Cf. Réf. 111, p. 68.

« La Bourse, j’en ai rien à cirer »

Sentence d’Edith Cresson, alors Premier ministre, le 19-05-1991. Cf. Réf. 112, page 69.

« Responsable mais pas coupable »

Mot de Georgina Dufoix, ex ministre le 03-11-91. Elle fit scandale, alors que le procès qu’on lui faisait n’était pas justifié. Cf. Réf. 115, page 70.

« Exception culturelle » (14-12-94)

La culture n’est pas une marchandise. Expression datée du 14-12-94. Cf. Réf. 120, page 74.

« Fracture sociale »

Expression favorite de Jacques Chirac, durant sa campagne présidentielle d’été à nov. 94. Souvent attribuée à Emmanuel Todd, qui n’en était pas l’auteur. Cf. Réf. 123, Page 76.

« Je crois aux forces de l’esprit »

Confession publique de F. Mitterrand, lors de ses vœux télévisés du 31-12-94. Réf. 125, p. 77.

« Pensée unique »

Très bien analysée en janvier 95, dans un éditorial d’Ignacio Ramonet ! Cf. Réf. 124, p.77.

« Je suis droit dans mes bottes »

Formule très connue, d’Alain Juppé sur TF1, le 6-07-1995. Cf. Réf. 127, p. 81.

« Le sida, on l’aura »

Slogan d’avril 98. Son double sens semble un lapsus de ses concepteurs…Cf. Réf. 144, p. 90.

« Je suis en Europe, donc je pense en euros »

Campagne européenne, atteignant un sommet de débilité en 1999. Cf. Réf. 146, p. 91.

« Je vais vous dire franchement une chose, je ne peux pas y croire »

Chirac, à Poivre d’Arvor, le 14-12-2000. Comment ne pas croire à ce qu’on fait. Cf. Réf. 155, p. 97.

« Nous sommes tous américains »

Journal Le Mondedu 12-09-2001 (daté du 13), au lendemain des attentats sur New York du mardi 11. Réf. 159, p. 100.

« France d’en bas » (mai 2002)

Expression favorite de Jean-Pierre Raffarin en mai 2002. Cf. Réf. 163, page 107.

« Je ne serai pas toujours muet »

Lionel Jospin après son échec aux présidentielles (13-08-2002). Voir Réf. 164, pages 107-108.

« La maison brûle et nous regardons ailleurs »

Jacques Chirac devenu écolo, le 2-09-2002. Cf. Réf. 166, page 109.

« Tant que le navire n’a pas touché l’iceberg, la croisière continue »

Sublime raffarinade du Premier ministre des années 2002-05. Réf. 165, page 108.

« J’y pense parfois, en me rasant »

Énoncé de Laurent Fabius le 15-10-03 que reprendra Nicolas Sarkozy. Cf. 171, page 112.

« Cerveau disponible »

Au cours de l’été 2004, le PDG de TF1 précise candidement ce qu’est le rôle de la pub à la télé : « Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible. » Cf. Réf. 174, page 114.

« Je suis propre comme un sou neuf » (24-02-05)

Justification d’un ministre de l’économie sur des avantages financiers illicites. Réf. 175, page 115.

« Il n’y a pas de plan B »

Vers mai 2005, à l’occasion du référendum. Réf. 176, page 116.

« Une relation durable, ça change la vie » (fév. 2006)

C’était donc au Crédit agricole qu’il appartint de nous « changer la vie » (voir cette expression). Réf. 182, page 121.

« En même temps » (2017-2020…)

Locution adverbiale signifiant « simultanément » ou « parallèlement », fréquemment employée par le président Macron, dans la perspective d’un dépassement du concept antagoniste droite/gauche. Le macronisme n’est ni de droite, ni de gauche, mais les deux à la fois, en même temps. Ce qui ne donne pas toujours l’impression d’un itinéraire politique rectiligne, évitant le zig-zag…

Le Songeur  (16-11-2023)



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