AFBH-Éditions de Beaugies 
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Songe à ne pas oublier-XXIII

MISS FRANCE ET MOI

Si l’on ose un concours de beauté entre intellectuels médiatiques, pour peu que l’harmonie de mes rides annoncent ma sagesse, j’ai toutes les chances de gagner.

Ce fut une grosse surprise. La nuit du 11-12-2021, citoyen consciencieux, j’écoutais vaguement Miss 2022 faire ses déclarations de récente élue, lorsque je crus percevoir cette affirmation parmi d’autres :

« J’ai envie de dire stop au racisme et à l’homophobie. »

« Tiens, moi aussi ! », me suis-je entendu dire.

Diane Leyre, nouvelle « reine de beauté » nationale, livrait une véritable profession de foi.

Je repris tout haut, au comble de l’émotion :

« Miss France pense comme moi. Et même pense pour moi :

Que je suis heureux d’être de mon époque ! »

Je revis alors le jeune homme pétri de préjugés que j’avais pu être jadis, il y a plus de 60 ans, quand je lisais Tintin au Congo en méprisant les peuples arriérés ou que j’exécrais les « pédés » en me demandant naïvement comment ils pouvaient faire pour... enfin bref !

Comme j’avais évolué depuis ces siècles antédiluviens ! Comme j’exultais de me sentir enfin « de mon temps », avec Diane et comme elle ! Qu’il était juste et nécessaire qu’elle représentât la femme d’aujourd’hui, « la femme française de 2022, forte, libre, engagée ». Féministe sans complexe, j’avais une furieuse envie de l’être avec elle, voire de devenir carrément femme en rejoignant son genre, puisqu’être femme, aujourd’hui, ce serait enfin pour moi comme pour elle « décider de faire ce que je veux »  Ô fantasme, ô mes Amis, ne baignons-nous pas tous dans cette modernité qui nous révèle chaque jour à nous-mêmes ? À l’évidence, chacun n’est-il pas appelé à faire ce qu’il veut, au 21ème siècle, au point d’en éprouver parfois la fugace impression ?

Et me sentant enfin bien dans ma peau, quoiqu’à l’âge où celle-ci prend quelques rides, je m’écriais en faisant ma toilette, avant de m’endormir :

Qu’avons-nous encore besoin d’une présidentielle, avec ses conflits mesquins, ses intérêts catégoriels ou ses idées archaïques, alors que nous nous trouvons déjà si bien socialement représentés dans le spectacle de cette Beauté parlante, qui incarne à la fois notre époque chanceuse et l’euphorie d’y vivre !

J’avais raison. Je suis dans le vrai, enfin. Et nous le sommes tous. Il est bien fini le temps des préjugés, des haines et des idéologies !

Ce qui suffit est simple, c’est le vivre ensemble.

Le Songeur  (28-07-2022)


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